Il n'y a pas d'autorité émettrice, mais un algorithme qui préside à une émission décroissante dans le temps, jusqu'à un maximum théorique de 21 millions d'unités environ. Il est divisible.
Environ 12 millions de BTC ont été émis à ce jour.
La propriété de chaque BTC, ou de chaque fraction de BTC, est authentifiée par l'ensemble des utilisateurs : un BTC ne peut pas être "copié" comme un simple fichier Word. En revanche, il peut être volé, comme n'importe quel portefeuille : il suffit de vous en voler sa longue clef numérique. On ne peut pas la violer, mais on peut la subtiliser. C'est pourquoi il est recommandé de stocker ses BTC sur un support déconnecté du réseau.
Le BTC présente toutes les caractéristiques d'une monnaie, comme l’or : réservoir de valeur concentrée, inaltérable, mobile, homogène, fongible. La seule différence entre les deux est que le BTC est immatériel, rendant la densité de valeur qu’il concentre quasi infinie.
Ulysse, enchaîné à son mât, résistant aux sirènes de l'inflation
Quel avenir pour le bitcoin ?
L'avenir du bitcoin est totalement imprévisible. Il se comporte actuellement comme une bulle de la grande époque (que ce soit celle des tulipes ou celle de 2000) décrite par Charles Kindleberger. Sa brutale ascension en 2013 semble soit le prélude à un effondrement spectaculaire, soit le grondement annonciateur d’un séisme monétaire de grande ampleur, par la remise en cause définitive du pouvoir monopolistique des banques centrales. Je vois plusieurs possibilités :
- une faille technique : un pirate trouve une faille dans l'algorithme, et le système s'effondre ;
- une monnaie concurrente : il n'est pas possible de créer un BTC hors du système BTC ; en revanche, il est tout à fait possible de créer un système BTC bis, une autre monnaie virtuelle, concurrente de la première ; BTC bénéficie d’un avantage compétitif, il est déjà adopté et considéré comme une monnaie ; mais contrairement à l’or, matière unique par nature, une monnaie virtuelle peut aisément être concurrencée par une autre monnaie électronique, comme une devise ordinaire peut être concurrencée par une autre sur le marché monétaire ; et de telles monnaies concurrentes existent déjà, s’engouffrant dans le sillon du bitcoin, et rêvant de répliquer son ascension, au grand bénéfice des premiers adoptants ;
- la menace réglementaire : les États pourraient entrer en guerre contre une monnaie qui sape leur souveraineté monétaire ; ils pourraient voter des lois interdisant la détention et/ou les transactions de BTC ; se poserait alors la question de l'application, difficile, d'une telle interdiction, alors que tout cela peut être crypté et échapper aisément à leur contrôle ; leur seule possibilité serait d'infiltrer les réseaux cachés, mais cela aurait vraisemblablement pour conséquence non de tuer les monnaies virtuelles, mais de les pousser dans la clandestinité, encore plus loin de leur contrôle, et dans une course aux armements bien connue dans tant d'autres secteurs ; une attitude plus intelligente serait de s'accommoder de l'existence du BTC et de l'apprivoiser ; mais on peut faire confiance à la France pour vouloir réguler à outrance une matière qu'elle ne comprend pas et qu'elle ressentira comme dangereuse, et probablement tuer un marché et des acteurs qui partiraient, comme celui de l'or et tant d'autres, à Londres ;
- la normalisation, la stabilisation et la généralisation : dans ce cas, son ascension se poursuivra encore de manière spectaculaire, jusqu’à trouver un équilibre avec les systèmes monétaires classiques, à un prix correspondant à la valeur des transactions libellées en BTC divisée par le nombre de BTC utilisés pour ces transactions.
Le bitcoin exaucerait dans ce dernier cas les rêves les plus fous des libéraux : ôter à l’oligarchie au pouvoir, quelle qu’elle soit, la capacité de diluer la monnaie, et la tentation de spolier le citoyen par l’inflation, selon le mécanisme décrit par Frédéric Bastiat dans son livre intitulé Maudit Argent. Ce n'est pas pour rien qu'il est ardemment soutenu par Peter Thiel. Le BTC rend ainsi impossible le contrôle centralisé du crédit, qui est la 5e proposition du manifeste du parti communiste de Marx et Engels, peut-être le seul vœu qu’ils avaient en commun avec les deux cents familles. Retourner au crédit 2.0 d'origine, reposant sur les transactions entre individus. Revenir à une sorte d’étalon-or, sous une forme numérique.
Il fera probablement horreur aux keynésiens, étant « déflationniste » : sa valeur ne peut que croître dans le temps, la dimension de l’économie étant croissante et la quantité de BTC étant quasi fixe. Mais l’or présentait la même caractéristique, et était pourtant plus stable que les monnaies inflationnistes du XXe siècle. Et la finitude de l’existence est de toute façon la réponse la plus implacable à la tentation de la thésaurisation, rendant la grande peur des anti-déflationnistes relativement illusoire.
Comme internet ou la langue d’Ésope, le bitcoin n’est pas intrinsèquement dangereux. Il est éthiquement neutre. Il peut servir d’instrument d’échange pour des actes, des biens et des services légaux ou illégaux, accomplis par des individus bons ou mauvais. Comme n’importe quel billet de banque.
Il n’est pas très sûr, n’étant pas nominatif ; en revanche, il échappe au contrôle de toute autorité, et est sous le seul contrôle des individus qui composent le marché. C’est sans doute sa principale caractéristique, son principal intérêt, en comparaison avec toute autre monnaie, même l’or, sur lequel il présente un avantage matériel : le Fort Knox du bitcoin se résume à une signature électronique, qui tient sur une clef USB, voire sur un morceau de papier ! Il ne nécessite pas la gestion onéreuse de tonnes de matière. Et nulle banque centrale ne peut générer de l’inflation en bitcoin, en faisant tourner une planche à billets, la quantité de bitcoin étant limitée, par construction.
J'ai le sentiment, sans en avoir de preuve, que le bitcoin sera à terme remplacé par une autre monnaie électronique présentant de meilleures qualités : plus ergonomique, plus sûre, plus transparente, plus facile d’utilisation, plus simple, moins gourmande en énergie pour l’entretien du système. Mais il fera en tout cas figure de précurseur et marquera durablement l'histoire de la monnaie (comme le système de Law ou l'ECU ou le DTS), des mathématiques appliquées et de la cryptographie. Mais jusqu'où montera-t-il avant de redescendre ? Quo non ascendet ? Nul ne peut le prédire.
Où en sera le bitcoin dans 1 an, 10 ans, 100 ans ? Rangé au rang des souvenirs comme l’emprunt russe, ou d’un usage quotidien comme la carte bancaire ? Le film ne fait que commencer.
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