- Adolfo Bioy Casares : L'invention de Morel.
- Bruno Le Maire : À nos enfants.
"je considère qu'aucune autre époque ne possède de romans de sujet aussi admirable que Le Tour d'écrou, Le Procès ou Le Voyageur sur la Terre ; ou que ce roman qu'a réussi, à Buenos Aires, Adolfo Bioy Casares" (p. 9, préface de Jorge Luis Borges)
"je crois que nous perdons l'immortalité parce que la résistance à la mort n'a pas évolué ; nous insistons sur l'idée première, rudimentaire, qui est de retenir vivant le corps tout entier. Il suffirait de chercher à conserver seulement ce qui intéresse la conscience" (p. 17)
"J'ai travaillé comme un exécutant prodigieux ; l'ouvrage est hors de toute relation avec les mouvements qui lui ont donné naissance." (p. 36)
"Je crois, en toute équanimité, que l'ouvrage ne devrait pas me perdre, puisque je puis le critiquer. Au regard d'un être omniscient, je ne suis pas l'homme que ce jardin fait craindre. Et pourtant, je l'ai créé. J'allais dire que là se manifestaient les dangers de la création, la difficulté qu'il y a de porter en soi, avec équilibre, et simultanément, plusieurs consciences. Mais, à quoi bon ? Ces consolations sont futiles." (p. 38)
"les conversations sont des échanges de nouvelles (exemple : météorologiques), d'indignations ou de joies (exemple : intellectuelles) déjà connues ou approuvées par les interlocuteurs. Le moteur est toujours le goût de parler, d'exprimer des accords ou des désaccords." (p. 44-45)
"Sur le moment, je me sentis content de moi. Je crus avoir fait cette découverte : il doit y avoir dans nos activités des répétitions constantes et inattendues. Une occasion favorable m'avait permis de l'observer. Il nous est rarement donné d'être le témoin clandestin de plusieurs entrevues entre les mêmes personnes. Dans la vie, comme au théâtre, les scènes se répètent." (p. 45)
"Nos habitudes impliquent un certain ordre dans la succession des choses, une vague cohérence de l'Univers. Or, voici que la réalité se propose à moi changée, irréelle. Quand un homme se réveille ou meurt, il met un certain temps à se défaire des terreurs du rêve, des préoccupations et des manies de la vie." (p. 72)
"il s'agit de ma dernière invention, nous serons vivants, sur cette photographie, à jamais. Imaginez une scène sur laquelle serait représentée toute notre vie durant ces sept jours. C'est nous qui jouons." (p. 73)
"J'éprouvai de la répulsion, presque du dégoût, pour ces gens et leur inlassable activité répétée. Ils se montrèrent plusieurs foi, là-haut, sur la crête. Vivre dans une île habitée par des fantômes artificiels était le plus insupportable des cauchemars ; être amoureux d'une de ces images était encore pire qu'être amoureux d'un fantôme (mais peut-être avons-nous toujours désiré que la personne aimée ait une existence de fantôme)." (p. 84)
"comme ce marin japonais à l'agonie vertueuse et bureaucratique, qui asphyxiait dans un sous-marin couché au fond de la mer." (p. 101)
"les moribonds qui font de vastes projets d'avenir ou qui revoient, sur le point de se noyer, une image minutieuse de toute leur vie." (p. 101)